Commissariat Valentina Locatelli
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L'exposition L’herbier de la mémoire : Laura De Bernardi, Gergana Mantscheva, Laura Sánchez Filomeno présente des peintures, dessins, objets et installations de trois artistes suisses et internationales dont les pratiques artistiques sont liées par une approche profondément introspective de l’identité personnelle et collective. À partir de véritables graines et spécimens de plantes séchées ainsi que des plantes et des rhizomes brodés, cousus à la main ou peints, chacune de ces artistes interroge le concept et la signification épistémologique de « l’herbier », proposant par là trois déclarations artistiques différentes mais complémentaires au sujet de la vie et de la mémoire.
À l'occasion de l’exposition L’herbier de la mémoire à Espace Muraille, les œuvres de Laura De Bernardi, Gergana Mantscheva et Laura Sánchez Filomeno sont présentées comme s’il s’agissait de spécimens hétérogènes empruntés à différents herbiers dans le but de comparer et d’étudier trois collections botaniques géographiquement et culturellement distinctes, mais néanmoins apparentées.
Exposées sur les deux niveaux de la bâtisse du XVIIIe siècle qui abrite Espace Muraille, la proximité physique des œuvres permet au visiteur de les étudier et d’en faire l’expérience individuellement, mais aussi en dialogue les unes avec les autres, ainsi qu’avec la substance historique de la galerie, qui, à l’occasion de l’exposition, est symboliquement transformée en un espace d’archivage. Cette dynamique active une approche comparative stimulante et génère également de nouvelles perspectives inspirantes quant aux pratiques singulières des trois artistes. Quelles sont les caractéristiques intrinsèques de chacune des œuvres exposées et de leurs créatrices ? Existe-t-il un fil rouge commun à l’œuvre et à la recherche de ces trois artistes, et ce malgré leurs contextes et leurs parcours différents ? Comment intègrent-elles (ou exploitent-elles) une représentation réaliste ou symbolique de la nature dans leur discours poétique ? Au-delà des qualités stylistiques et matérielles évidentes qui différencient leur approche individuelle de l’étude de la nature comme source d’inspiration principale, les œuvres de De Bernardi, Mantscheva et Sánchez Filomeno peuvent être interprétées ensemble comme un puissant atlas visuel de souvenirs émotionnels, à la fois personnels et collectifs.
En employant différentes approches et techniques artistiques - de la peinture traditionnelle à l’huile ou à l’acrylique, aux broderies et aux installations éphémères d’éléments textiles et non textiles tels que les graines et les pollens - ces trois artistes ont constitué leurs propres collections impressionnantes d’« herbiers », à partir desquelles se déploient leurs recherches approfondies sur la gestualité, d’une part, et sur les racines culturelles et la mémoire, d’autre part. Grâce à un vocabulaire visuel à la fois délicat et provocateur, elles thématisent des questions complexes d’identité, enracinées dans une réflexion qui englobe le genre et la géographie, l’histoire et la politique, les références autobiographiques et l’inclusion de différentes représentations de l’altérité.
Laura De Bernardi
Née en 1970 à Minusio, Suisse. Vit et travaille à Minusio.
Diplômée de l’École cantonale d’art de Lugano (CSIA), Laura De Bernardi s’est spécialisée dans la peinture à l’Académie de Brera à Milan, où elle a étudié avec Luciano Fabro et Tommaso Trini. La pratique artistique de Laura De Bernardi repose sur une étude minutieuse et presque encyclopédique de la diversité et de la multiplicité des formes de vie et de leurs modèles de croissance. Intriguée par l’interaction des matériaux naturels et artificiels, par l’alternance du plein et du vide ainsi que par la pratique de l’accumulation et du réarrangement, elle étudie le monde à travers un processus incessant de couture, collectant des spécimens et réalisant des dessins et des annotations dans ses précieux carnets miniatures. Au fil des ans, De Bernardi a alterné de fréquents séjours de recherche à l’étranger - comme au Spazio Visarte à Paris (2002), au Brésil (2001) et à Addis-Abeba (2003/04) - avec une activité d’exposition prolifique en Italie, en France et en Suisse. Parmi ses nombreuses expositions individuelles et collectives, il convient de mentionner sa participation à l’Anteprima della XIV Quadrenniale di Arte di Roma 2003-2005 (Turin, 2003) et Open Studio à la Fondazione Arthur Cravan (Milan, 2010), qui souligne son intérêt pour le travail des collectifs artistiques. En 2024, elle a présenté son installation grand format et in situ Raccolta au musée fédéral suisse Vincenzo Vela à Ligornetto, en Suisse.
Gergana Mantscheva
Née en 1975 à Sofia, Bulgarie. Vit et travaille à Lüsslingen (Soleure), Suisse.
Gergana Mantscheva a étudié la peinture à l’Académie nationale des arts de Sofia (1994-2000). Ses peintures et ses dessins se caractérisent par une forme de réalisme résolument influencée par sa jeunesse et ses années formatrices dans la Bulgarie socialiste. Profondément attirée par les images du pays qu’elle a dû laisser derrière elle lorsqu’elle s’est installée en Suisse à la fin des années 1990, elle n’a cessé depuis de puiser dans ce vocabulaire visuel, qu’elle approfondit continuellement depuis la distance géographique et historique qu'elle a acquise. Ses peintures sont le résultat d’un processus cathartique qui lui permet de faire face à la fois à l’histoire politique de la Bulgarie et à ses sentiments et souvenirs d’une époque et d’un peuple révolus. Les œuvres de Mantscheva ont été montrées dans le contexte de nombreuses expositions collectives en Suisse, en Grèce et en Allemagne. Elle a reçu les prix d’encouragement pour l’art et la peinture de la Fondation Rentsch (2010), de la Regiobank Solothurn (2016) et du canton de Soleure (2023). En 2024, elle a présenté sa première exposition individuelle dans un musée suisse (All Over, Kunsthaus Grenchen).
Laura Sánchez Filomeno
Née en 1975 à Lima, Pérou. Vit et travaille à Cachan, France.
Laura Sánchez Filomeno est diplômée en peinture de l’Université catholique pontificale du Pérou à Lima, titulaire d’un DNSEP (Diplôme national supérieur d’expression plastique, option art) de l’École supérieure des beaux-arts du Mans, ainsi que d’un doctorat en arts plastiques et sciences de l’art de l’Université Panthéon-Sorbonne à Paris. Son travail artistique s’articule autour de la pratique de la broderie, une technique qu’elle a apprise en autodidacte et dont elle a fait sa signature personnelle pour aborder des questions liées à la nature et à son exploitation ou sa préservation, au genre et à la féminité, ainsi qu’aux forces opposées de l’attraction et de la répulsion. Récompensée par de nombreux prix et reconnaissances internationaux tels que la Mention et le Prix d’acquisition ASM (Association Selectiva Moda) à la Biennale Contextile au Portugal (2016), elle a également participé au festival Détissages en tant qu’artiste invitée à la Maison Tadashi Kawamata à St-Thélo, en France (2017). En France, Sánchez Filomeno peut se prévaloir de nombreuses expositions personnelles et collectives, notamment Compendium Naturae, au Centre d’Art Ile Moulinsart, Fillé sur Sarthe (2019), et Symbiosium Cosmogonies Spéculatives, à la Fondation Fiminco à Romainville (2023). En 2024, elle a présenté sa dernière importante exposition personnelle à l’Orangerie de Cachan (Taxinomie), et ses broderies ont également été incluses dans l’exposition collective Une brève histoire de fils à la Maison de l’Amérique Latine à Paris.
Photo by Florencia Blanco Sanchez